La réaction à l’épidémie de nos sociétés européennes, en panique mais solidaires, blessées sans avoir rien vu venir, démontre que notre volonté de résilience est la plus forte. Des comportements citoyens au Green Deal, notre corps social se soigne et appelle les systèmes à plus d’efficacité sociale et d’équité dans les décisions, quitte à abaisser le PIB, à augmenter les dettes et à tordre quelques libertés irresponsables de rouler en Porsche ou de chauffer les terrasses des cafés. La remontée du collectif se fait dans la douleur.
Comme on ne supporte plus de voir depuis nos plages les radeaux de déchets qui empêchent les enfants de s’ébrouer, symbole de notre inconscience individuelle, économique et politique, on est arrivé au bout du discours du « je » peux tout, sais tout et veux tout. Il faut vite remettre la gouvernance collective au centre de l’économie de marché, de la mondialisation et de la société de consommation. C’était déjà le débat Illich versus Marcuse d’il y a trente ans. Mais on n’avait pas voté à l’époque les Objectifs du Développement Durable, ni posé l’Accord de Paris, ni admis qu’une démocratie participative était devenue indispensable et réalisé que les réseaux sociaux sans éthique avaient autant d’inconvénients que d’avantages.
Nous allons beaucoup apprendre de ce temps de guerre. Qu’il soit l’occasion d’accélérer le passage du modèle emballé au modèle maîtrisé, « durable » à travers ses trois dimensions inséparables, pour apprendre à conjuguer partout performance économique, sociale et environnementale, à le vivre au quotidien, à le mettre au centre de l’entreprise*, à en faire le cadre de la décision publique. Le développement durable est la seule grande idée géopolitique qui ait émergé depuis la déclaration de San Francisco en 1946 qui a remis l’ONU en selle.
Depuis des années qu’on cherche à remettre de la gouvernance collective en économie de marché, on beaucoup de solutions sous le pied, des péréquations aux biens communs, des seuils de concentration à la co-régulation. Il faut là aussi faire davantage confiance aux scientifiques, davantage anticiper les risques et davantage innover dans les modes d’action, en considérant enfin qu’une décision qui n’est pas socialement légitime peut être économiquement inutile… La durabilité est la prochaine station avant la fin d’un voyage qui se sait sans horizon. Il nous faut choisir entre le confinement des continents ou « l’aurore de l’universel ».
No Comments